Écran philosophique

La frontière intérieure ou l’initiation à l’humanité

Mardi 21 octobre 2003 à 20 h 30

par Patrick Vauday, professeur de philosophie et directeur de programme au Collège International de Philosophie.

La captive aux yeux clairs , de Howard Hawks (USA - 1952 - 2h05 - VO)

Voici un western qui n’obéit pas aux lois ni aux figures imposées du genre ; qui ne part pas à la conquête de l’Ouest avec les habituelles scènes d’action entre pionniers et Indiens ou outlaws ; dont les protagonistes, qui parlent aussi bien français et indien qu’américain, vont plus souvent en bateau qu’à cheval. Voici donc un western sans légende qui montre une lente et difficile remontée du Missouri de Saint - Louis aux terres indiennes du Montana, ponctuée de scènes intimistes au coeur des grands espaces.

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Affiche
La captive aux yeux clairs

Ce n’est pas une épopée mais un voyage initiatique semé d’embûches, à la frontière du jour et de la nuit, du blanc et du noir, de la nature et des cultures, du masculin et du féminin. Comme dans toute initiation à l’humanité, la frontière à franchir est moins extérieure qu’intérieure.

Patrick Vauday


Le trappeur Jim Deakins fait la connaissance de Boone Caudill. Les deux hommes commencent par se battre, puis se rendent ensemble en ville. À Saint-Louis, les deux trappeurs déclenchent une bagarre et se retrouvent en prison. Deakins et Caudill, libérés, accompagnent des trafiquants français dont le but est de remonter le Missouri en achetant des peaux aux Indiens afin de « doubler » la Compagnie qui trust le marché des fourrures... mais ils ne résisteront pas aux charmes d’une ravissante Indienne. Coups de feu et de foudre assurés...La captive aux yeux clairs est un western inhabituel. Pas de poursuites, ni de chevauchées mais une intrigue lente, aussi majestueuse que le fleuve remonté par les trappeurs ; ce film est avant tout une histoire d’hommes, et Hawks s’est passionné pour l’amitié qui va unir Jim Deakins à Boone Caudill. Un danger va cimenter cette profonde camaraderie, et le mot qui symbolise le mieux ce film est sans doute « simplicité ». Hawks refuse tout ce qui pourrait détourner le spectateur des personnages, et cette rigueur donne à cette aventure une surprenante beauté. Chaque détail prend alors soudain une véritable valeur, les gestes comme les paroles. Aujourd’hui où le western n’existe pratiquement plus en tant que genre, après les enflures et les exagérations du western italien, la captive aux yeux clairs peut sembler anachronique, comme un film muet, dont il possède le classique, la tendresse et la pureté. De tous les westerns de Hawks, celui-ci est le plus secret, le plus difficile aussi, et ce voyage que vont accomplir les protagonistes est une véritable initiation à l’aventure et à l’amitié. À ne pas manquer.

André Moreau

Informations

Au cinéma Georges-Méliès
Centre commercial de la Croix-de-Chavaux
93100 Montreuil

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